MODE ECORESPONSABLE

Vous l’avez manqué ? Pas de panique ! Nous vous avons partagé le replay et retranscrit les moments forts de ce webinar riche d’informations.

 Trend & Tendance a animé, très récemment, un webinar répondant à la principale question : « Comment allier écoresponsabilité et créativité ? ».

 Pour cette occasion, nous avons donné la parole aux deux auteures du tout nouveau Guide de La Mode Écoresponsable.

- Nous avions envie de mettre à l’honneur l’écoresponsabilité. Puisque c’est dans l’air du temps mais surtout puisque cela est très important pour les créateurs mais également pour les consommateurs.
Vous avez co-écrit ce livre toute les deux. Dans un premier temps, je vous laisse vous présenter et nous en dire plus !

Alice Lehoux :

Nous nous sommes rencontrées sur les bancs de l’école : une école de commerce spécialisée dans le textile. Nous travaillons dans l’industrie textile depuis une bonne dizaine d’années.

Pour revenir sur mon parcours, après avoir été chef de produit, je me suis dirigée vers les pays de production. Étant de nature très curieuse, j’ai voulu aller voir comment ça se passait dans les usines et faire du sourcing, au Vietnam, mais aussi en Chine et au Cambodge.

A mon retour en France en 2016, j’ai commencé à faire de l’audit social pour essayer de comprendre toutes les conformités. Je travaille sur l’aspect social de la chaine d’approvisionnement dans le textile.

Natacha Ruiz : 

A la base, je me suis toujours occupée de la communication et de la distribution des marques. J’ai beaucoup étudié et observé comment on crée une marque de A à Z, notamment lors de mon alternance. Par la suite, je suis partie aux États-Unis, à New-York, pour en découvrir plus sur la partie créative, couture et dessin. C’est là-bas que j’ai collaboré avec un collectif de mode écoresponsable. C’est à ce moment-là et à cet endroit que j’ai découvert cet aspect responsable. J’ai alors eu l’envie de m’y impliquer.

J’ai par la suite rejoint la Fédération Française du prêt-à-porter féminin. J’ai été environnée de tous les acteurs du secteur mais je me sentais limitée en tant que salariée. En 2012, j’ai donc crée ma première entreprise, qui était à la fois un magazine, un e-shop et des concepts stores éphémères où l’on présentait des créateurs qui avaient cette volonté de respecter l’humain et l’environnement.

J’ai également voulu toucher le grand public en participant à des projets de séries télé.

- Comment l’idée d’écrire ce livre vous est venue et comment cette collaboration est arrivée ?

Alice Lehoux :

L’idée du livre nous est venue après nous être revues. Effectivement, par la suite, mon chemin ainsi que celui de Natacha se sont recroisés. Nous nous étions perdues de vue. Alice et moi-même avons deux profils assez différents et surtout complémentaires. Après discussion, nous avons décidé de communiquer sur les parcours de production de textile. Ce qui est vertueux, moins vertueux … Communiquer et informer sur les matériaux les moins impactants et expliquer comment faire les choses différemment de manière à avoir plus de sens pour les consommateurs, mais aussi pour ceux qui créent et pour les pays de production.

Lorsque je suis revenue en France, mon entourage me demandait souvent des conseils sur ce qu’il valait mieux acheter et consommer. Donc je répétais souvent les mêmes informations et les grandes lignes. « Ce label permet de.. vérifie que… »

Et je me suis dit qu’il fallait écrire un petit livre. C’est justement à ce moment-là que j’ai rencontré de nouveau Natacha et que l’idée nous est venue.

De base, je lui ai donné un leaflet où l’on explique comment choisir sa viande, ses œufs … Donc c’était vraiment le basique du basique. Et nous nous sommes dits que c’était ce qu’il fallait développer, mais adapté au textile. « Le coton, oui mais lequel ? ».

Nous avons commencé avec quelques pages et au fur et à mesure cela a pris de l’ampleur. Il fallait partir du début et expliquer comment cette industrie est née, comment les dérives ont commencé…

En tant que consommateur : « comment je peux faire au mieux en allant dans les magasins ? » « Où dois-je acheter ? » « Est-ce mieux la viscose que le polyester ? ». Tant de questions auxquelles nous voulions répondre dans ce guide.

- A qui s’adresse ce livre ?

Natacha Ruiz :

De base, c’était davantage  un livre destiné aux consommateurs pour qu’ils deviennent acteurs de leur consommation. Mais nous prenons conscience que c’est un livre qui concerne tout le monde : aussi bien les professionnels que le grand public.

Dans mon parcours, je me suis rendue compte que le public ne réalise pas souvent comment on fabrique un vêtement, le temps que cela nécessite pour les créateurs quand ils fabriquent du « fait main » …

J’ai eu cette volonté de valoriser l’âme transmise par les créateurs.

Ce livre sensibilise sur la mode et sur ce qu’elle représente dans notre société.

Nous avions l’envie de reconnecter les professionnels au grand public pour qu’ils puissent échanger et aussi pour que les créateurs repartent des attentes du client afin d’élaborer leurs collections.

- Pour aller dans le vif du sujet ... le polyester représente environ 60 % de l’industrie textile mondiale. Quels conseils donnez-vous aux créateurs pour qu’ils choisissent les bonnes matières pour leurs collections, pour qu’elles soient plus écoresponsables ?

Alice Lehoux :

Pour ce qui est du polyester, en effet c’est une énergie fossile très impactante. Et ce, à la fois sur son émission en carbone et sur son utilisation en eau.

Cependant, s’il on écoute un ingénieur qui fait des études : il approuve que c’est aussi la matière la plus durable en terme de temps.

Mais elle est aussi très impactante sur l’entretien, elle va décharger des microplastiques qui vont se décharger dans les océans et vont se retrouver dans la chaine alimentaire.

Selon moi, aujourd’hui, il faut penser « durable », c’est la préoccupation numéro 1. Il faut donc choisir une matière qui va durer longtemps et construire son vêtement pour qu’il aille plus loin.

Après, lorsque l’on a regardé la matière, le point de vue technique du vêtement, on va se demander « qui va être apte aujourd’hui d’acheter un vêtement qui va durer ? ».

Certes, le polyester dispose de nombreux avantages techniques, il a été inventé à la seconde guerre mondiale pour les parachutes. C’était de base une matière très innovante. Néanmoins, en tant que créateur qui souhaite développer une collection, il est important de prendre en compte les limites environnementales engendrées par l ‘utilisation du polyester.

Par la suite, vient alors le moment où le jeune créateur doit se poser des questions importantes, par exemple, s’il doit créer une veste durable ou technique durable : «  Y-a-t-il des stocks d’autres marques ou des stocks déjà produits ?».

De la même façon, s’il souhaite en obtenir une nouvelle « Y en a-t-il de la recyclable ? ».

Par ailleurs, s’il s’agit d’une grande marque, il faut mettre en place une traçabilité et regarder de quelles matières recyclées provient le polyester.

Les marques doivent privilégier  un impact carbone et eau les moins impactants possible.

Parallèlement,  il y a toutes les questions sociales qui s’intéressent à « Comment et dans quelles conditions l’on crée ? » auxquelles les producteurs doivent s’intéresser.

- Comment mettre en place cette traçabilité et tout ce travail de sourcing ? Ce n’est pas facile.

Alice Lehoux :

Si je suis une grande marque, je vais dans les salon dédiés aux textiles pour évaluer les certifications et la traçabilité.

Pour les plus petites, il faut essayer de faire avec ce que l’on a et utiliser des stocks déjà produits.

- Cette création a souvent un prix plus élevé, est-ce que l’écoresponsabilité dans la mode se démocratise ?

Natacha Ruiz :

Au prix juste ! « Quel est le prix qu’on veut faire par rapport aux coûts de la production et des matières ? » Il est aussi bénéfique d’arrêter les soldes pour retrouver le rapport qualité/prix juste.

Certes, il se dit de la mode écoresponsable qu’elle est chère, mais il y a aussi des vêtements qui se vendent à 200 euros et que ne sont pas de bonne qualité !

Il faut se dire qu’à partir du moment où le produit va respecter l’humain et l’environnement, il aura un coût ! Donc c’est aussi aux consommateurs, qui deviennent acteur, de comprendre la valeur de ce produit et ce que cela implique de le fabriquer. Un vêtement c’est complexe ! Surtout si on part sur la personnalisation et le sur-mesure. On ne peut pas brader un vêtement ; Il faut rééduquer le consommateur pour qu’il comprenne qu’un vêtement durable sera rentabilisé.

Cela permettra de produire moins mais de manière plus spécifique. Et le produire à une vraie valeur.

En tant que créateur, il faut donc évaluer son positionnement. « Décide-t-on que le produit va respecter l’environnement ? »

On ne peut pas brader un vêtement adapté au corps humain, personnalisé, fait sur-mesure. Il faut produire moins, de manière plus spécifique, mais de qualité.

Il faut donc éduquer les gens à voir le prix réel d’un vêtement.

- Après le confinement, nous avons remarqué que les gens continuaient de se diriger vers le mass-market. Certaines de ces enseignes fabriquent aussi, et à moindre coût, des vêtements en bambou, en coton recyclé… Où est le juste milieu ?

Alice Lehoux :

Il y a différentes questions ou différents aspects. Avec ce type de guide, on parle d’éducation mais surtout d’information. On explique comment comprendre le vêtement et  reconnaître un vêtement de qualité.

Si j’achète un produit de Fast fashion, OK, mais je le regarde, je fais connaissance avec lui, je prends le temps de regarder les détails (fermetures zip…). Ce Guide permet donc de l’acheter en connaissance de cause et de se rendre compte qu’il a potentiellement eu un impact sur le fabricant.

A ma connaissance, le solvant utilisé pour la viscose de bambou n’est pas recyclable et est donc polluant. Il faut éviter et préférer le coton. Mais ce n’est pas encore le top car il y a le coton biologique irrigué et non irrigué.

Donc il faut se demander « Comment je fais au mieux ? » et prendre soin de ces produits.

Il faut aller étape par étape et se demander « Quelle est l’image et l’implication de la marque dans sa stratégie d’écoresponsabilité ?».

Voici les étapes qu’il faudrait mettre en place pour acheter en toute conscience :

  1. Prendre connaissance du produit
  2. Évaluer sa qualité
  3. Décrypter l’étiquette avec les compositions en ayant une mini connaissance de ces impacts
  4. Aller plus loin et regarder où il a été produit, l’impact sur l’humain. Se demander si l’entreprise en question fait son bilan carbone ?

Natacha Ruiz :

La durabilité et l’écoresponsabilité se trouvent davantage dans l’utilité que l’on fait du produit.

Il faut donc se poser la question de « pourquoi je l’achète ? », « est-ce que je vais le mettre au moins 30 fois ? ». Et si non, on peut plutôt le louer, l’emprunter, aller dans les « second hand ».

Il y a aussi la possibilité de faire de l’up-cycling ! Il y a plein de possibilité, et je pense que là où la créativité et l’écoresponsabilité peuvent se rejoindre c’est autour de l’innovation. Prendre et faire quelque chose de nouveau à partir de cela. Plutôt que de partir à base de matières naturelles comme le coton et le lin, il est préférable de repartir de l’existant.

Alice Lehoux : 

Il est important pour les marques de travailler la diversité. Ne pas se concentrer que sur un coton, mais se demander s’il on peut utiliser le lin a côté, par exemple. Il ne faut pas de mono culture.

Une marque qui fonctionne en écoresponsabilité c’est justement une marque qui va diversifier ses matières et connaître son impact, à tous niveaux.

C’est au devoir des marques de certifier que les matières qu’elles utilisent sont justes, pour leur image et pour les consommateurs.

La force des marques est d’avoir une stratégie RSE sincère. La transparence au niveau de la communication est vitale.

Avec ce guide, l’importance est de montrer qu’il faut avoir conscience qu’il y a du bon et du moins bon.

Des marques comme Veja réussissent sur le marché actuellement. Pourquoi ? Parce qu’ils sont parties de la base : la matière première. Et elles arrivent à remonter à la confection.

La chance qu’ont les « petits » créateurs ou « petites » marques et qu’ils peuvent tracer dès le départ en choisissant leur matière.

ЦИКЛИЧНАЯ МОДА ВО ФРАНЦИИ - LE JOUR DE LA MODE CIRCULAIRE
trend&tendance

- J’aimerais vous parler d’une créatrice avec laquelle je suis en contact et qui rencontre de nombreux problèmes. Elle confectionne des doudounes à base de matières de cuir écoresponsable de pomme. Elle a un succès fou de par le coté original des matières utilisées et donc de l’aspect des produits. Néanmoins, ce n’est pas rentable pour elle car elle n’arrive pas a sourcer des usines qui travaillent ce cuir.

Alice Lehoux :

Ce sont des matières non adaptées aux machines industrielles. Il faut revoir la production et voir si on peut les travailler différemment, à la main par exemple.

Faire des matières écoresponsables c’est un challenge car c’est nouveau.

Natacha Ruiz :

Il faut aussi revenir à la cible. Il faut que le créateur s’adresse à une « persona » type. Cela lui évitera de produire en masse pour rien et de revenir aux spécificités du corps, pour qu’on personnalise.

Vendre ça plutôt comme un produit de luxe et ne pas lancer ça « à la chaine ».

Tout dépend du business model qu’il faut bien choisir.

Il faut sans cesse adapter, innover pour trouver des alternatives. Les gens ont envie de ça. De quelque chose de nouveau.

Pour aller plus loin, visionnez le replay de notre webinar et découvrez ainsi l’ensemble des questions/ réponses.

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