VILLA NOAILLES TREMPLIN POUR LES CREATEURS.

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Villa Noailles. Le Festival International de Mode, de Photographie et d’Accessoires de mode à Hyères, a lieu chaque printemps à la fin avril, au moment où toute la Côte d’Azur est immergée dans les arômes de fleurs du jasmin et du rose.

A ce moment-là, à la villa Noailles  se retrouvent  les invités, les finalistes et membres du jury. Elle se situé sur le promontoire au-dessus de la mer, à côté des ruines pittoresques d’un château médiéval. Perle d’architecture de style moderne de la première moitié du XX siècle, elle a été un lieu de rencontres pendant l’été des artistes d’avant-garde des années vingt. Les anciens propriétaires, amateurs d’art et mécènes, le vicomte Charles de Noailles et sa femme Marie-Laure, rassemblaient ici l’élite de la société intellectuelle et créative, qui habitait  cependant à Paris. Giacometti, Cocteau, Picasso, Dali, Bunuel, Man Ray et d’autres êtres célestes des arts y venait boire du vin rosé provençal en bonne compagnie.

Le Directeur de la villa Noailles, Jean-Pierre Blanc, qui a passé son enfance à proximité, a renouvelé la tradition des rencontres des artistes. En 1985, il fonde le « Salon Européen des jeunes créateurs», rebaptisé ultérieurement le Festival de Mode, de Photographie et d’Accessoires. Une année marquante pour la villa débute en 2015, lors de la célébration du trentième anniversaire du festival, auquel participe avec son entourage Karl Lagerfeld, qui, avec son talent habituel de transformer pour le meilleur tout ce qu’il touche, agit comme directeur artistique du festival. La Princesse Caroline de Monaco fait partie des membres du prestigieux jury de cette année particulière. Et comme chaque année, la maison de mode Chanel offre l’occasion aux lauréats de créer une collection avec les Maison Lesage et Goosens.

Le Festival offre chaque année un soutien exceptionnellement important à la création, grâce aux mastodontes tels que Woolmark, Mercedes-Benz Berlin, Les Yeux sur Talents et d’autres.

Les Grands Prix :

  • Salon Première Vision donne une occasion de présenter la collection à New York et Paris, et une prime de 15.000 euros.
  • Une collaboration avec la maison de couture Chanel et un montant de 15.000 euros.
  • Une collaboration avec Petit Bateau et une prime de 10.000 euros.
  • Le prix Chloé est de 15 000 euros.

Le 33ème Festival qui s’est déroulé en avril était orchestré par le parisien aux racines colombiennes Haider Ackermann. Haider Ackermann, connu pour ses créations futuristes aux coupes compliquées, néo-romantique, est familier de la Villa Noailles, et de ce concours. Ses parents habitaient à cinq kilomètres de Hyères, et en 2008 le designer intègre le jury. Pour cette 33ème édition du Festival, Haider Ackermann est si séduit par les œuvres des élèves de l’université Finlandaise, qu’il souhaite sélectionner dix finalistes exclusivement de l’école supérieure Aalto d’Art, de Design et d’Architecture d’Helsinki. Ce ne sera finalement pas le cas. Ce délicat rôle de sélection était cette année dévolu aux membres de ce jury exceptionnel dont l’actrice Tilda Swinton, la chanteuse Lou Doillon (fille de Jane Birkin), le parfumeur Ben Gorham, le créatrice de bijoux Delfina Delettrez Fendi, l’historien et auteur de la mode Farid Chenoune et la lauréate du Festival 2017, la créatrice Vanessa Schindler.

La première chose que vous remarquez lorsque vous venez au Festival est la qualité du public, radicalement différente des Fashion Week Parisiennes. Ici, tout est imprégné d’idées innovatrices, et de l’enthousiasme des finalistes de ce festival dont les yeux sont brûlants d’espoir et de foi dans le succès et la force intellectuelle dépourvue de snobisme. Vous ne verrez pas ici de sacs « bestseller » ni de bijoux représentatifs  du «luxe pur», portés en permanence par les visiteuses des salons parisiens. Ici, tout est fait à la main, dans un petit studio, «sur les genoux», et les collections présentées par les finalistes du concours sont pour la plupart leurs dernières œuvres. C’est l’occasion de réaliser, de manière agréable mais surprenante, la qualité de ces travaux «semi-artisanaux».  C’est le summum !

Tant par l’originalité des projets présentés, que par leur présentation et leur exécution. En voyant les travaux des dix finalistes, en discutant avec ces designers, je réalise la difficulté du rôle du jury qui se doit de choisir le meilleur parmi les meilleurs. En effet, chacun des participants est incroyablement talentueux, et chaque collection est unique, originale et ne ressemble à aucune autre.

Étonnamment encore «accessible», Rushemy Botter a accepté mon offre d’être un ami sur  FB quelques heures après que j’ai envoyé la demande. Il est un créateur des Pays-Bas avec des racines des Caraïbes. Diplômé de l’Académie Royale des Beaux-Arts d’Anvers,  il est cette année le gagnant du Grand Prix du Festival. Quelques mois auparavant, Rushemy Botter avait atteint la finale du prestigieux concours LVMH. Dans une interview, il raconte que lorsqu’il était un enfant, il n’envisageait absolument pas de devenir un créateur de mode, de par l’environnement dans lequel il est né et a grandi. S’engager dans la mode est pour le moins difficile, pour ne pas dire embarrassant. Se rendant dans les magasins de vêtements avec d’autres adolescents, il feuillette secrètement les revues. La culture des jeunes des banlieues des années 80 devient aujourd’hui une brillante tendance de la mode et est actuellement sur le pic de popularité de la deuxième génération du XXI siècle, appelée Les Millénnials.

La collection « Fish or Fight » de Rushemy Botter et Lisi Herrebrough a fasciné le jury du Festival avec une composition d’originalité et de pertinence. Couleurs vives inspirées par les îles des Caraïbes, destructivisme et approche écologique sans lesquels ne peut être inspiré le créateur aujourdhui. Les filets de pêche, utilisés comme éléments de l’image, sont conçus pour attirer l’attention du public sur les pêcheurs locaux et les dommages causés par la pêche industrielle sur l’environnement.

Mais je dois admettre que je suis beaucoup plus proche du travail de Linda Kokkonen de Finlande. Dans sa collection présentée lors de sa thèse, la jeune fille expose des silhouettes inspirées par le monde mystérieux de la magie. La garde-robe d’une sorcière moderne avec des tenues de motards, dans laquelle les robes col fermé et longues sont dominées par un tissu de soie extrêmement fine et légère. Et aussi des vestes de moto en cuir recyclé, personnellement assemblées par la créatrice en patchwork. Définitivement, la mode durable est la tendance principale de la future génération de créateurs.

Une jeune créatrice du Canada, diplômée de l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers, Marie-Eve Lecavalier s’est vue décerner le prix Chloé. Son univers créatif est si fantastique que les journalistes posent involontairement la question de l’utilisation de substances hallucinogènes par la jeune fille. Marie-Eve sourit et affirme qu’elle n’a jamais essayé la drogue, et les images qu’elle crée, entre rêves et réalité, sont le fruit pur de son imagination. Comme la plupart des finalistes du Festival, Marie-Eve Lecavalier est très impliquée dans les questions environnementales. Les principaux matériaux avec lesquels la jeune fille travaille sont recyclés de jeans usagés et de cuir.

Le monde des Impressionnistes – plein de couleurs et de formes – inspire la finaliste de Belgique, Sarah Bruylant. Ses grands chapeaux et ses robes à crinoline, peints à la main comme des tableaux impressionnistes revivifiés, pleins de vie et de féminité, ont remporté le prix du public.

Une autre diplômée d’Aalto, Antonina Sedakova de Saint-Pétersbourg, a atteint la finale avec une collection masculine, inspirée par le travail du chanteur des années 80-90 Viktor Tsoi. Le personnage principal, comme il est à la mode de le dire aujourd’hui, est « l’icône du style » pour toute une génération d’adolescents « des banlieues » des villes de l’URSS. Et encore une fois les variations sur l’inévitable thème du « street-style », mais cette fois dans un registre «intellectuel» supérieur. Antonina Sedakova est enthousiaste à propos de son travail, elle est pleine d’énergie et de talent. En regardant son travail et en écoutant son discours émotionnel, je suis submergée de fierté et de foi dans la jeune génération des designers russes qui, j’en suis persuadée, sauront retrouver leur identité, malgré toutes les difficultés actuelles.

 

Enfin, le Festival d’Hyères est, à mon sens, un évènement incontournable du programme pour tous ceux qui se considèrent comme faisant partie d’un monde intellectuel, jeune, nouveau et à la recherche de sources d’inspiration.

Texte : Tatiana Stolyarova

 

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